Ma Polygamie

Ma polygamie, cette vie que je n’échangerai pour rien au monde

« Cette histoire de ma polygamie que vous vous apprêtez à lire est une histoire vécue; seuls les noms des personnages ont été changés, pour protéger leur anonymat »

Je suis l’enfant unique de ma mère, j’ai vécu avec ma grand-mère et ma tante, il n’y avait pour ainsi dire aucun homme dans ma vie. Mon père ayant refait sa vie avec une autre femme, j’ai donc un demi-frère et une demie-sœur. Détestant ces expressions, ce sont mes frère et sœur.

Je n’ai eu comme entourage familial que des femmes. Je ne les remercierai jamais assez pour tout ce qu’elles m’ont apporté. Sans femmes, je ne serai pas un homme.

Ma polygamie est une famille sans laquelle je ne serais plus.

Raccourcis :


Ayawa

Lorsque j’étais en France, jeune et dans le vent, j’ai cherché l’âme sœur, sincèrement, mais à la manière des autres. Sans succès bien sûr, mais heureusement je n’étais pas un chercheur efficace. C’est par cette amie que j’ai considéré comme ma sœur, une de mes rares amis, que j’ai trouvé une femme magnifique. Celle qui allait devenir “la première”. Nous la nommerons ici Ayawa.

Fille aînée d’une famille Mina togolaise, Ayawa s’était convertie à l’Islam. Après avoir voyagé à Lomé puis dans son village d’origine au Bénin, j’ai pu convenir du mariage avec sa famille. Ancrée dans le culte vaudou animiste, nous avons dû nous battre un brin pour y arriver. Mais de manière générale nous n’avons finalement pas trop souffert. Notre mariage, islamique, a eu lieu dans la discrétion, ouvrant la voie à la naissance de notre fille aînée un an plus tard.

Avoir la chance d’épouser une bonne épouse ne se ressent, ou en tout cas ne se comprend, qu’après de nombreuses années. Car passé le temps des amourettes et des envolées passionnelles il ne restera que la foi et l’éducation pour animer un foyer. Ces attributs sacrés deviennent le pilier d’une famille polygame lorsqu’elle se compose et perdure.

Mon Seigneur m’a gratifié de patience et de discernement. Je pense aussi que mon amour pour la femme noire m’a permis de ne pas m’attarder trop sur le physique de chacune. De toute façon, si c’est une fille bien, je l’aimerai.


Polyga.me n’est propulsé que par un instinct vengeur, donnez-lui de la force…


Globe Trotter

En bon voyageur j’ai fais plusieurs pays, j’y ai vécu. Comme tout être humain j’en ai aimé plus que d’autres. Parfois à cause de mon vécu sur place, d’autres fois pour des raisons de rapports humains, d’atomes crochus.

C’est comme ça que j’ai aimé certains peuples d’un amour sincère. Les Somalis en Afrique de l’Est m’ont marqué à vie. Un esprit vif, une culture unique, des cœurs hurlants et droits, je respecterai ces gens jusqu’à ma mort.

De l’autre côté du continent noir mon âme s’est enracinée. Le Mali est le pays qui a conquis mon cœur dès mon arrivée. En mission sur place pour un an, j’ai succombé. J’ai compris que j’y reviendrai pour y finir mes jours avec ma famille.

Ce peuple m’a touché. Honnête, serviable, pacifique, croyant, priant. Chacune de ses ethnies est une entité de l’histoire de l’Afrique de l’Ouest. Peuls, Dogons, Malinkés, Songhaïs, Soninkés, Bambaras… J’ai tout appris ici, je me suis rééduqué, j’ai appris le partage et l’amitié vraie, la foi et le rapport à la vie. J’ai appris à être un homme.

Notre prophète (ç) étant notre exemple j’ai voulu rendre cet amour indestructible. J’ai cherché une seconde épouse sur place. Malheureusement, j’ai eu beaucoup de mal. Non pas que je sois difficile ou qu’on me repousse, mais les occasions sérieuses étaient rares. Ça n’est qu’un an plus tard que mon ami Vieux m’appelait pour me dire de venir. En route pour Bamako je me dirigeais vers la polygamie. 

Le haut fantasme masculin

Rêve de tous les hommes, la polygamie n’est pas un roman à l’eau de rose. Sa réalité est un choc pour quiconque n’y est pas préparé, particulièrement si l’on n’a pas de vécu culturel ou parental lié à ça. De même, vivre des années avec une seule épouse donne de “mauvaises habitudes” pour une adaptation adéquate. 

La relation de “potes” est en opposition avec le comportement des couples de familles polygames. Non pas que la fusion des cœurs soit un problème, mais ce sont les écarts comportementaux qui peuvent devenir un frein au passage à une vie conjugale multiple bien pratiquée.

Daado

Épouser Daado a été un bouleversement. D’abord, avoir deux épouses était un rêve éveillé. Mais c’est surtout une leçon de vie que j’ai pris. Les maliennes sont éduquées, leur culture est complète, enfin presque. Être négligent dans mon comportement ne pouvait qu’entrainer ma honte. C’est dans ce contexte que les écarts de comportement, enclins à la monogamie, ne peuvent être qu’incompris. 

Cette peule de Nioro du Sahel était un exemple dans son adoration islamique et dans ses faits et gestes. Quoi de mieux pour s’améliorer que de faire attention à ne pas la heurter ? Sa famille, son père, avaient fait confiance à mon ami, qui mettait lui-même sa réputation en jeu en me représentant dans ce mariage. En respectant tous ces paramètres je ne pouvais que devenir meilleur.

Enracinés au Mali

Cette fois-ci ma vie et ma famille, ma descendance, étaient liées à jamais au Mali. J’y achetais une terre à quelques kilomètres de la capitale et pris mon temps pour y construire le théâtre de nos vies.

Quelques années plus tard alors que j’étais en voyage, un de mes amis proches m’expliquait sa déception de ne pas l’avoir consulté avant d’épouser ma seconde femme. Il voulait absolument me confier sa cousine et ainsi lier nos familles par le mariage. Au bout d’un temps, après avoir parler avec mes épouses, je m’engageais dans un voyage vers Kankan en Guinée pour me lancer dans les démarches.

Balakisa

Briefée, sans doute même de manière un peu exagérée, la famille de Balakisa m’attendait de pied ferme. J’ai passé mes quelques jours sur place à négocier les modalités du mariage, découvrant la proximité entre les traditions Sousous et Bambaras. Aussi j’en profitais pour rester avec un ami djiboutien, un frère de longue date, que j’ai connu lors de ses études de médecine à Bamako, devenu médecin à l’hôpital de Kankan. J’y retrouvais aussi mon ami Dieng, journaliste guinéen Peul qui exerçait autre fois à Bamako.

Une fois le mariage entériné, à la mosquée comme à la mairie, le nouveau couple allait apprendre à se connaître dans un périple en Renault Nevada d’un état plus que misérable, sur la fameuse route de Guinée qui devait nous ramener au Mali. Que d’amour forcé entre les voyageurs collé-serrés et la musique mandingue du poste de radio. Mais ce sont parfois les moments difficiles et la dureté des voyages qui restent parmi les meilleurs souvenirs. Un peu comme ces 24h d’escales assis sur des sièges à l’aéroport d’Alger.

Une famille en devenir

Je me dois de rendre grâce à mon Seigneur qui m’a donné une famille en paix, de nombreux enfants unis et en bonne santé, de quoi vivre et la foi pour se maintenir dans l’adversité. La polygamie n’est pas un jeu d’enfant, un fantasme de jeune adolescent boutonneux, il s’agit d’une responsabilité et d’un engagement envers les épouses, leurs familles respectives et notre descendance commune.

Les années passent si vite. Ma progéniture s’est multipliée, les jeunes pousses ont grandi et ce cocon est devenu leur contexte familial. Les valeurs de l’Afrique, cette éducation primordiale qui place les aînés et la hierarchie en son centre, et l’Islam ont bercé leur enfance. Toujours en voyage, d’est en ouest, mes enfants parlent arabe, peul, bambara, français, sousou. Un mixage culturel qui les a liés les uns aux autres.

Ma vie polygame

J’ai pris en âge mais surtout en expérience. Et ma famille a fusionné en une structure unique. Alors que nous étions habitués à vivre dans des appartements séparés, nous avons, au fil des années, fini par vivre tous ensemble dans une seule maison, un vrai foyer. Les repas communs du vendredi sont devenus quotidiens et je me suis habitué à me surveiller dans mes gestes.

Car si vivre seul avec une femme est le commun de tout un chacun, être l’homme de plusieurs épouses au même endroit est une autre vie. Un sourire doit être destiné à toutes, un geste doit être parfaitement banal et innocent. La jalousie est une seconde nature chez les femmes, mais quoi de plus normal lorsqu’on aime la même personne et qu’on se doute bien qu’il aime l’autre ? Et d’ailleurs, laquelle aime-t-il le plus ?

Cette question que les femmes se posent souvent, surtout dans les cercles de prédatrices monogames haineuses, les hommes généralement s’en fichent. Il y a toujours des préférences, mais les cœurs parfois tournent et les histoires forgent les relations les plus durables.

Ainsi donc, j’allais de tour en tour, chez l’une puis chez l’autre. Au coucher du soleil je pliais bagage vers un autre monde. Parfois le cœur serré de ne pouvoir rester un peu plus, parfois pressé de voir la prochaine, toujours en fonction des aléas des relations humaines. De temps en temps le rythme se brisait par un de mes voyages, des fois dû à un accouchement ou une maladie qui nécessite ma présence prolongée.

Ma polygamie, mon amour

Les sentiments que je porte à mes épouses sont très forts. Il y a l’amour physique de l’homme pour une femme, il y a celui d’un père pour la mère de ses enfants, il y a le respect qui convient à des femmes de cette trempe. Leur gentillesse et leur éducation, le respect qu’elles me donnent, leur compréhension, leur tolérance, le traitement et l’honneur à mon égard. Il y a l’incroyable amour qui les lie. Je les aime de toute mon âme. Je ne serai jamais le mari de leurs rêves, mais elles sont les femmes des miens.

Polygamie et culture

Suivant les pays où nous avons vécu notre vie subissait le contexte. Dans certains pays arabes la polygamie est un mystère, une légende, faisant de nous une curiosité. Mais le pire que nous ayons vécu est la présence de français. Le mal-être de leurs ressortissants a eu l’effet de radiations néfastes. Notre famille a commencé à se transformer, quelques embrouilles naissantes, sans réelle consistance. Et plus l’entourage français réduisait, par des départs par exemple, plus la sérénité regagnait notre nid.

Quoi de plus logique dans ce contexte toxic que de vivre parmi les nôtres ? Le Mali est un bastion de la polygamie. Les ONG françaises qui combattent les coutumes ici se fatiguent et affronte le stoïcisme d’une population qui aime les habitudes de leurs pères. On voit des conférences sponsorisées par les sous-mains de la France appeler à cesser l’excision, les gens applaudissent et rentre chez eux pour aimer leurs épouses excisées. Tout le monde s’en bat les couilles, pour parler clairement.

Badjènè

Mali mon amour

En revenant chez nous, progressivement, on a aimé plus ardemment ce pays. Le Mali est un havre de paix, Bamako du moins. Les évènements relayés à l’international sont une simple rumeur dans la capitale. La seule trace réelle est la rareté des locations dûe à la venue de nombreux villageois. La fuite des infâmes massacres du centre du pays a forcément des effets migratoires. 

En nous installant, de nouvelles relations se sont créées, forcément. De nouvelles amitiés et des retrouvailles familiales émouvantes pour Daado. Son immense famille, si chère à nos cœurs à tous, a pu profiter de notre retour au maximum. C’est en restant avec ses sœurs qu’elle a pu rencontrer et se lier d’amitié avec Badjènè. Descendue de son village Makana jusqu’à Bamako pour ses études elle cherchait aussi à se marier. Sa famille n’étant pas sunnite, elle était au meilleur endroit pour débusquer un bon prétendant.

La quatrième

Au vu de la publicité qui m’était faite, je me suis dis que c’était une occasion de revivifier une tradition islamique et une coutume régionale. Badjènè devint donc ma quatrième épouse et s’installait dans notre nid. J’aime me servir d’elle comme d’un bon exemple pour les célibataires ou tout homme qui veut se marier. 

En tant qu’amie de Daado elle est venue plusieurs fois chez nous lui rendre visite, mais je ne l’ai jamais vu. La seule chose qui m’ait attiré vers elle c’est ce qu’on m’a dit de son éducation et son bon comportement. Marier une inconnue alors que m’a famille est soudée depuis plus de quinze ans est une vraie prise de risque qu’il m’était impossible de prendre. 

Ce mariage est une réussite. Et je remercie une fois de plus mon Seigneur de maintenir mon discernement dans ces moments où de nombreux hommes auraient obéis à leurs passions. Je ne vais pas dire qu’il ne manquait qu’elle dans ma famille, mais s’il fallait y ajouter une personne alors elle était celle qui fallait.

Polygame et fier

Je suis bien conscient que la plupart des lecteurs ici présents n’ont pas le bagage culturel et intellectuel pour accepter notre mode de vie. Mais sommes-nous tous forcés de vivre à l’occidentale ? La polygamie est intrinsèque à la vie africaine. Qu’elle soit en terre d’Islam ou animiste, cette pratique ici est ancestrale. Ce que j’écris ici, sur ce modeste blog, ces lignes d’homme réactionnaire polygame, ne demande pas votre avis illuminé. Ma religion est l’Islam et je n’ai que faire de vos manières de vivre ou de voir les choses. Je vous ignore de mon plus beau mépris. Faites-en de même.

Retrouvez toute la vie de cette famille polygame dans le blog Journal d’un Polygame.